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Ellen M. Schnepel (2004) : In Search of a National Identity : Creole and Politics in Guadeloupe, Kreolische Bibliothek Band 19, Buske Verlag, Hamburg, 294 p.

mercredi 27 avril 2005, par Ehrhart, Sabine

Sabine Ehrhart [1]

L’ouvrage d’Ellen Schnepel a l’avantage de présenter des faits d’actualité doublés d’une approche mini-diachronique : son premier contact date de 1981 et les vingt années qui se sont écoulées depuis son plus long séjour sur le terrain (1984-86) lui permettent d’adopter une perspective longitudinale des événements autour du fait créole en Guadeloupe. Or l’on sait combien cette île antillaise est peu représentée dans la littérature scientifique créole. Ses observations pertinentes et riches en détails passionnants montrent qu’elle est fréquemment retournée aux Antilles, qu’elle est restée en contact avec ses amis et informateurs. Cela lui a permis d’approfondir son évaluation des phénomènes complexes qu’elle a rencontrés au travers de multiples échanges avec des chercheurs travaillant sur les phénomènes créoles dans le monde entier.
Son livre va bien au-delà du cadre de sa thèse soutenue en 1990. La lecture de sa présentation très vivante des Antilles, de la Guadeloupe et en particulier de l’analyse de l’expérience scolaire menée à Capesterre-Belle-Eau sera appréciée des anthropologues, des sociologues et de toutes les personnes qui s’intéressent à la politique linguistique et à l’enseignement en milieu plurilingue.

La présentation éditoriale de l’ouvrage est soignée, avec deux cartes (Antilles et Guadeloupe) et une liste des abréviations au début ; à la fin du livre, dans les appendices, sept exemples illustrent différentes manières d’écrire le créole guadeloupéen. Ces exemples sont basés sur divers types de textes allant de 1975 à 2000. Ceux-ci sont suivis d’une comparaison synthétique de quatre alphabets créoles et de cinq dessins humoristiques en créole qui illustrent les enjeux politiques de la question des langues. Les 37 pages de bibliographie concernent surtout le contexte antillais mais reflètent également les grands courants de la recherche en créolistique dans le monde. Ces derniers sont pour la plupart représentés dans leur ouvrage-phare. Il est à regretter que certaines des publications plus récentes fassent défaut, p.ex. Chaudenson 2003 a & b, Bickerton 1999, Tabouret-Keller 2002, et Hazaël-Massieux 1999. Des créolistes originaires d’autres régions francophones comme de Robillard et Véronique n’apparaissent pas non plus. L’absence d’index est comblée en partie par une table des matières très détaillée.

Le choix de la langue anglaise [2] tient à l’origine de l’auteur. Il peut s’expliquer également par le besoin de donner une partie des résultats aux organismes américains qui ont financé cette recherche et par le souci de créer des ponts entre la recherche en milieu francophone et la recherche en milieu anglophone. On peut expliquer cette démarche par le fait que le monde anglophone cherche à jouer un rôle croissant dans cette région du globe, rôle qui est d’ailleurs parfois revendiqué de manière virulente [3]. Le mérite d’Ellen Schnepel est d’avoir su garder une position neutre dans un débat qui suscite beaucoup de polémiques.

Les deux citations de Frantz [4] Fanon et d’Édouard Glissant mises en exergue sont représentatives des différents courants et attitudes envers la place des créoles dans la société antillaise. La première date de 1967 [5] : elle reflète une dichotomie prononcée entre les traits caractéristiques de la population noire (le complexe d’infériorité est si grand que même le terme de « culture » est évité dans ce contexte) et la culture des colonisateurs, culture à laquelle aspirent les colonisés. Dans cette vision toute en noir et blanc, le seul but des colonisés est un haut degré d’acculturation.
La citation de Glissant est beaucoup plus nuancée [6]. On la retrouve fréquemment dans la littérature scientifique touchant au créole et elle évoque un antagonisme plus récent, entre un engagement naïf et folklorisant pour la cause du créole et les menaces politiques réelles qui pèsent sur la langue. Si Ellen Schnepel avait ajouté une autre citation de Glissant (1981, p. 334) : « Le ‘manque’ n’est pas dans la méconnaissance d’une langue (le français), mais dans la non-maîtrise d’un langage approprié (en créole ou en français) », sa problématique aurait été plus claire, et elle aurait pu faire référence à la notion d’écologie du langage [7]. Cette prise de position nous prépare à la démonstration que fait l’auteur de In Search of A National Identity : Creole and Politics in Guadeloupe quant aux sociétés créoles actuelles, où il n’est plus possible de désigner un ennemi extérieur : la « menace » ou l’impulsion en direction d’un changement se situent à l’intérieur de la communauté créole elle-même.

De plus, on remarque dans l’ouvrage en question que la structuration des idées suit des cercles concentriques du plus grand environnement socioculturel au plus petit (chapitres 1 à 5), avant de retrouver une problématique plus universelle (chapitres 6 à 8).
L’introduction donne le cadre historique et social de la politique linguistique menée aux Antilles depuis la fondation de la colonie au 17ème siècle. Ellen Schnepel y explique son choix de la Guadeloupe par le manque de documents de recherche existant sur cette île et aussi par son approche méthodologique – elle présente ici une des premières études de cas complètes concernant l’aménagement linguistique d’une île créolophone, dans les domaines de l’anthropologie et de la sociologie du langage. Le bilan général qu’elle donne de son travail montre les contradictions qui caractérisent le mouvement créole (p. 12) : « It analyses how Creole language development and the promotion of Creole in Guadeloupe in the 1980s, instead of fostering social equality and creating solidarity, led to greater societal conflict as the struggle and debate over language became a manifestation of more complex problems in the sociopolitical system. »
Le Chapitre 1 retrace l’historique de la politique linguistique dans le monde. Les noms des pères fondateurs tels Kloss, Weinreich, Ferguson sont présents. Certains auteurs sont cités uniquement dans des publications anciennes (Khubchandani 1983 à la page 18 ; Fishman 1972 dans un long développement, pp. 22-27) alors que leurs théories se sont considérablement transformées depuis. Pour expliquer des faits qui se situent dans les années 1980, le choix de citations de cette époque s’explique parfaitement. Cependant, dans une recherche de perspectives d’avenir, une réactualisation des données aurait pu élargir l’horizon de l’étude [8].
La situation sociodémographique de la Guadeloupe est présentée au chapitre 2, avec une mention des provenances des différents groupes de population, leur stratification actuelle [9] et les fissures existant au sein du tissu social (p. 55 : « Contradictions within the Social System of Guadeloupe »).

Le chapitre 3 « Creole in Guadeloupe » part des origines du terme « créole » et de son application précise aux Antilles depuis le 17ème siècle. Schnepel (p. 63) se base sur la tradition locale : « Prudent (1980) singles out four main stages in Creole’s development of French Antilles : the early years of French colonization, the aftermath of the enactment of the Code Noir in 1685, the post-abolition period (1848-1946), and the modern era of departementalization, commencing with the assimilationist law of March 1946 ».
La suite historique est exposée dans le chapitre 4. L’auteur explique que pendant les années 1960 et 1970, l’engagement personnel de quelques individus qui se sont parfois réunis en très petits groupes de pression a forgé le paysage idéologique dans lequel s’est développé le mouvement nationaliste créole. Le tableau « Creole Promotion Groups » à la page 116 donne une idée de la complexité des liens qui unissent (ou des sujets qui opposent) les différents protagonistes. Le mouvement prend de l’ampleur au début des années 1980.
Malgré la dimension plus collective du mouvement créole dans ces années-là, les initiatives en faveur de la langue n’arrivent pas à se détacher du domaine individuel et de l’activité de quelques personnes. Le chapitre 5 sur le conflit à l’école de Capesterre illustre ce point. En 1981, trois professeurs du C.E.S. de cette petite commune rurale prirent l’initiative d’organiser des cours de créole. Au cours des années suivantes, ils purent négocier un accord avec leurs supérieurs hiérarchiques. Cet accord reflète aussi le lent changement d’orientation dans les directives du Ministère de l’Education Nationale français [10]. Finalement, l’opposition fut plus forte au sein des associations de parents d’élèves [11] et au sein de la communauté même des enseignants et les défenseurs du créole se retrouvèrent vite isolés. L’expérience ne fut pas suivie ailleurs, à l’exception de quelques cas isolés. Selon Schnepel ce sont des facteurs extralinguistiques principalement qui expliquent l’échec de ces initiatives : « The Creole question effectively masked social conflict that was not linguistic in nature. »
Le reflet des conflits qu’avait générés cette expérience scolaire est expliqué dans le chapitre 6 et dans les illustrations humoristiques à la fin de l’ouvrage ; les prises de position des partis politiques concernant la situation des langues et particulièrement du créole occupent le chapitre 7.
En guise de conclusion, le chapitre 8 tente d’aborder la question de la recherche identitaire en contexte guadeloupéen. Il aurait été intéressant d’inscrire cette conclusion dans un cadre plus universel, en s’appuyant par exemple sur Le Page & Tabouret-Keller et leur Acts of Identity et la réception qu’ont reçue leurs idées [12].
L’épilogue ouvre sur des questions de changement de société, de réorientation politique, sur l’introduction du CAPES « créole » en 2001 ainsi que sur les débats houleux qui ont suivi cette initiative [13].

A la suite de cette présentation très détaillée de la société guadeloupéenne et de sa lutte pour une justice linguistique telle qu’elle nous a été offerte par Ellen Schnepel, le lecteur aurait envie de faire des hypothèses sur la dynamique linguistique qui sera à l’œuvre pour définir la place du créole dans la société guadeloupéenne de demain.

Une ouverture aux tendances universelles dans la recherche en créolistique pourrait offrir quelques pistes. Les avancées récentes dans le cadre de la théorie de la complexité [14] nous montrent que les relations entre les langues qui entrent en contact sont beaucoup plus complexes que ce qui peut être décrit par le scénario diglossique traditionnel langue forte et survivante versus langue faible et mourante [15]. Ceci est vrai lors des premières phases de contact et lors de la naissance d’un créole, mais également tout au long de l’histoire d’une société plurilingue. On peut interpréter la créolisation comme une stratégie de survie et de maintien de la diversité : par la transmission intra- et intergénérationnelle, des éléments linguistiques passent de la langue faible, dont la survie est souvent menacée, dans la nouvelle langue de contact en train de se former. Ceci peut avoir lieu grâce au processus d’acquisition et d’attrition linguistiques dont le déroulement précis reste à analyser. Le degré de concentration sur la nouvelle culture dépend du statut dont jouissent les représentants de chaque groupe qui participe à l’interaction (empowerment) [16].

Or, on a souvent oublié de mentionner que toutes les langues qui entrent en jeu subissent des transformations importantes, ainsi la langue dite dominante se transforme au contact de la langue dominée et minorée et une créolisation peut se solder par une décréolisation. Ainsi un rapprochement des langues autrefois en situation diglossique peut avoir lieu : dans le cas de la Guadeloupe l’on pourrait envisager un continuum qui serait franco-créole.
Après la lecture de cet ouvrage très informatif au niveau sociétal, la question se pose de savoir comment définir le créole guadeloupéen actuel. Une étude linguistique des variétés modernes du créole pourrait s’intégrer également à la collection « Kreolische Bibliothek » publiée par Buske, collection qui présente des ouvrages de description de linguistique interne ainsi que des ouvrages qui lient les faits linguistiques aux facteurs externes de la société comme dans le présent ouvrage.

Bibliographie

Auer, P. & Mair, C. (2003) : Annual Report Collaborative Research Centres 541 : Sprache als Mittel der Identitätskonstruktion and Abgrenzung,
www.dfg.de/jahresbericht/projekte download
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Vaillant, L. (2004) « French & English in Haiti », lettre rédigée à Toronto, le 19 octobre 2004 et publiée le même jour sur : CreoleTalk@yahoogroups.com

Véronique, D. (1994) : Créolisation et acquisition des langues, Publications de l’Université de Provence, Introduction pp. 7 – 31.


[1] SE prépare son habilitation sur la dynamique dans le contact de langues et notamment dans les processus de pidginisation et de créolisation avec les universités Albert-Ludwigs-Universität, Freiburg/Breisgau et Paris 3 – Sorbonne Nouvelle. Elle fait également partie du groupe Pluriel « Plurilinguisme, enseignement des langues et dialogue interculturel » à l’IUFM de Strasbourg et de l’EA 1339 « Linguistique et Didactique des Langues » à l’Université Marc Bloch de la même ville.

[2] Les citations dans le livre sont données dans la langue d’origine, en français (sans traduction) et en créole (avec une traduction en anglais).

[3] Lemane VAILLANT dans son texte « French & English in Haiti » rédigé à Toronto le 19 Octobre 2004 (nous citons avec l’orthographe de l’auteur) : « Les raisons pour lesquelles Haïti a tous les intérêts à se donner l’Anglais comme langue officielle en gardant le Français parlé et écrit par 10 % d’Haïtiens comme langue seconde, et le créole comme langue populaire de communication locale »
1) C’est qu’après 200 ans, la preuve est quasi faite que le Gros Peuple Haïtien ne pourra jamais (culturellement, historiquement, psychologiquement, sociologiquement et autres) maîtriser, parler et écrire la Langue de Voltaire et de Molière, le français pour le nommer clairement. (…)
5) La Francophonie est anti-développante partout dans le Tiers-Monde et dans le Quart-Monde (…)
7) Nous n’aurons jamais le statut de la Guadeloupe ou de la Martinique par rapport à la France. Donc, en ne gardant que la langue française chez nous en Haïti stupidement, idiotement et imbécilement, nous nous condamnons en fait au sous-développement culturel et intellectuel perpétuel. A Vie. Nous resterons ainsi isolés linguistiquement en pleine Caraïbe Anglophone et Hispanophone (…)
8) Nous sommes en Amérique, non en Europe. Pensez au prix d’un Billet d’avion PAP/Haïti - Paris versus un Billet PAP - Miami. (...)

[4] Franz Fanon dans la bibliographie, les deux orthographes sont attestées dans la littérature.

[5] L’original a été édité à Paris en 1952 sous le nom de « Peau noire, masque blanc » ; l’auteur est décédé en 1961.

[6] « Soulignons que c’est au moment où le créole est le plus menacé en tant qu’outil social qu’il trouve le plus de défenseurs triomphalistes pour crier sa vitalité (…) ». (Discours antillais, 1981 : 174)

[7] Pour le concept d’écologie linguistique voir : Calvet 1996 ; Blanchet 2000 ; Mufwene 2001 ; Mühlhäusler 2003.

[8] Les données les plus récentes concernant la politique linguistique (mais qui n’étaient pas encore disponibles au moment de la finition du présent livre en 2003/2004) se trouvent dans un ouvrage que J. Fishman prépare avec Martin Pütz (voir les actes du colloque « Empowerment » de Landau 2004 ; indications bibliographiques sous Ehrhart/Mühlhäusler/Mair à paraître).
Lachman Khubchandani et Elana Shohamy s’expriment dans le Rapport Final du X LINGUAPAX CONGRESS ON LINGUISTIC DIVERSITY, SUSTAINABILITY & PEACE qui s’est tenu à Barcelone du 19-23 Mai 2004/WORKSHOP 3 : Balance of the Current Sociolinguistic Research : New Trends and New Paradigms, p.3 : « In a plurilingual interaction no single language caters to all the needs of the participant. Language in everyday life communication is a form of dyadic behavior, the choice of using a particular language, or a creative blending of different speech varieties, is determined by various institutional and pragmatic factors of identification (status, prestige, attitudes, etc).
In the realm of language policy-making and language planning we tend to ‘perceive’ languages in monolithic terms. Language revitalization and language rights movements also generally focus attention on monistic aspects of language A or language B. But in a plurilingual paradigm, we need to look at communication profiles in relative terms, responding in a unique manner to the space-and time-bound institutional imperatives, and not judging them as per the dictates of universal ideological standpoints (such as on language autonomy, language uniformity, language purity, etc). »

[9] L’introduction (p. 9) nous rappelle : « (…) with the lack of a significant white Creole element, interracial mixing has been much less pronounced in Guadeloupe than in Martinique, and today its population is more racially homogenous, comprised essentially of a black majority. »

[10] Cf. Hélot, Ch. (2003) : Le plurilinguisme en construction dans le système éducatif.

[11] Des recherches récentes comme Parent Power : Parents as a Linguistic and Cultural Resource at School de C. Hélot et A. Young (à paraître) montrent effectivement que le manque d’implication des parents est souvent (co-)responsable de l’échec dans les expérimentations linguistiques scolaires et qu’un travail de consultation et d’action conjointe entre les enseignants et la famille a le plus de chances d’aboutir à une réelle légitimation des langues minoritaires par les enseignants et par les locuteurs de ces langues elles-mêmes, parents et élèves.

[12] Cf. les publications de Auer/Mair pour la recherche sur « Langue et identité » à l’université de Freiburg en Allemagne ; ceci aurait pu enlever en partie l’amertume que caractérise le bilan de l’expérience.

[13] Voir aussi Bavoux/Robillard 2002 et Chaudenson 2003a pour l’implantation du CAPES « créole ».

[14] Cf. les 6 tomes de la Méthode d’Edgar Morin et la traduction partielle de leur message par Philippe Blanchet 2000 ; pour la diglossie : Tabouret-Keller 2002, sous presse.

[15] La citation de Mair, C. 2003:35 concernant le créole à base anglaise de la Jamaïque va dans ce sens : « The sociolinguistic evidence points to the existence of a continuum of gradual but by no means unsystematic transitions between more creole-like and more English-like ways of speaking – with options for fine-tuning that go beyond anything that can be modelled against our current understanding of bilingualism, code-switching or code-mixing. »

[16] Pour décrire la concentration, le terme de focus chez Lepage & Tabouret-Keller 1985 est très utile. En ce qui concerne le terme d’« empowerment », voir les publications dans le cadre de la conférence LAUD qui s’est tenue à Landau en 2004 (Ehrhart, Mühlhäusler, Mair, à paraître).

Ehrhart, Sabine (sabine.ehrhart@wanadoo.fr)